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«Seules les montagnes ont
vécu assez longtemps pour
écouter objectivement
les hurlements du loup».
Aldo Leopold
naturaliste américain
1887-1948
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Un mot de Hubert Reeves (nov 2006)
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Communiqué - Bilan de la pétition (mai 2004)
Faut-il crier au loup avec les loups ?
     • Réaction du CLAN
Des loups des Laurentides exposés à Paris

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Hubert Reeves
Hubert Reeves et Benoît Ayotte - Photo: G.Borgia

Un mot d'Hubert Reeves

Oui, il faut apprendre du loup du Labrador comment il vit à cet endroit du monde. Savoir qui il est puis partager ce que vous aurez appris de lui avec tous ceux - dont je suis - qu'il fait rêver.

La ligue ROC vous remercie avec moi de contribuer à préserver ce loup qui, comme tous les prédateurs participe à la pérennité des espèces qui vivent sur le même territoire.

Merci.

Amicalement
Hubert Reeves, astrophysicien
Président de la ligue ROC
www.roc.asso.fr
Ref : nelly.b@nordnet.fr
29 Nov 2006


texte fonds (à venir)

Bilan de la pétition «lupine» - (à venir)




Faut-il crier au loup avec les loups ?

Par: Louis-Gilles Francoeur
LE DEVOIR, 11 octobre 2000

Pierre Hatin n'en revient toujours pas! Employé à la retraite du service environnemental d'Hydro-Québec, il arrive d'une chasse au Témiscamingue avec un copain qui fréquente l'endroit depuis 20 ans. Chaque fois qu'il a «callé» l'orignal, racontait-il la semaine dernière, une bande de loups surgissait de nulle part pour croquer cette femelle orignal en simili-rut.

«C'était tellement invraisemblable, surréaliste, qu'on a arrêté de "caller". Ça n'avait plus de bon sens. On ne voyait que des loups devant nos caches. Et, évidemment, pas une trace d'orignal. Autour de nous, un désert. Une forêt rasée à perte de vue avec de petits épouvantails de sapins maigrichons en bordure des ruisseaux. Montagne après montagne, c'était la même chose. Les prédateurs comme le loup en sont à la limite de la survie pour répondre ainsi aux faux appels d'orignal. Ça veut dire qu'il n'y a plus rien à manger. Et pour rendre ça plus permanent, ils ont utilisé de gros bulldozers pour tourner la terre. Ils vont planter des arbres en rangées pour transformer cette forêt en jardin. Un massacre écologique: d'un écosystème vivant, ils vont faire un désert biologique permanent que les touristes ne verront pas parce qu'il est vert.»

Je lui ai suggéré de prendre sa plume et d'écrire un mot pour la chronique des lecteurs. Mais le même jour, j'ai reçu du Clan des loups du Québec, un organisme récemment fondé, un dossier-choc sur les problèmes de survie que poserait pour le loup... la pratique de la trappe au Québec.

Malgré quelques critiques bien fondées, j'aurais mis de côté ce dossier-choc qui n'en est pas un s'il n'illustrait pas cette tendance inquiétante à remettre en question les activités de récolte faunique à partir de jugements de valeur péremptoires et de conclusions, sans base scientifique, qui dépassent largement les minces prémisses avancées. Et, dans tout cela, pas la moindre analyse sérieuse des problèmes de raréfaction des proies et de leurs problèmes d'habitat dans certaines régions, dont dépend ultimement le loup.

Le Québec compterait, selon les évaluations gouvernementales, quelque 4000 loups, toujours présents sur 90 % du territoire des meutes ancestrales, hormis la rive sud, où il a été rayé de la carte à la fin du XIXe siècle. Sur la rive nord, il subit en outre la concurrence du coyote en milieu rural.

Selon le Clan des loups, les méthodes d'inventaire gouvernementales ne sont pas fiables car on se fie essentiellement aux statistiques fournies par les trappeurs, une technique d'évaluation si peu fiable qu'elle «menace incontestablement cette précieuse espèce faunique en plus de l'exposer inutilement à une dangereuse surexploitation». Grosse conclusion pour une critique théorique d'une méthode d'inventaire! Surexploitation, prétend le document, parce que les quelque 8000 trappeurs actifs du Québec font en outre partie d'une coalition hermétique d'intérêts, formée des pourvoyeurs, chasseurs, pêcheurs et gestionnaires de ZEC, tous des gens qui seraient réfractaires aux «nouvelles valeurs» fauniques, en particulier l'observation de la nature, la voie de l'avenir si on cessait de trapper et de chasser... On imagine de pleins autocars de Français débarquer dans les pourvoiries pour admirer rats musqués, martes, pékans, loups et loups-cerviers que même les trappeurs n'arrivent pas à voir en liberté...

Le Clan des loups marque toutefois un point en notant que Québec ne valide pas les données sur la trappe aux loups par des inventaires aériens sur des parcelles échantillonnées, plus fiables que les statistiques. Celles-ci affirment qu'une récolte se maintient mais ne disent pas si l'effort s'accroît, ce qui annoncerait un déclin. Un fait demeure et mérite effectivement réflexion: le nombre de peaux de loup enregistrées depuis 1989 au Québec est en déclin relatif. On passe de 388 cette année-là à 290 en 1998-99, avec des sommets entre 500 et 600 au milieu de la décennie.

Mais ces statistiques prêtent à caution car, en réalité, cette baisse de la récolte pourrait s'expliquer par le fait que le nombre de trappeurs diminue, ce que, dans une logique toute animaliste, on attribue au fait qu'il s'agirait d'une «activité désuète et passéiste». Des épithètes qui dénotent surtout une propension à des jugements de valeur péremptoires et émotifs. Depuis des millénaires, les humains trappent, et cette toute nouvelle et toute récente «vérité» est surtout le fait d'urbains déconnectés de la nature, qui perçoivent les humains comme ne faisant pas partie des mécanismes de sélection naturelle, comme n'ayant pas une place organique dans la nature: une vision «urbaine» de l'écologisme, où les prémisses morales et émotives tiennent souvent lieu de science.

Québec a voulu, par des exigences réglementaires très précises, faire sortir du bois les trappeurs improvisés en exigeant de tous une formation minimale. La mesure a eu du succès et a servi à faire le ménage à plusieurs égards. Bien des gens ont suivi le cours par curiosité, ce qui a pu faire gonfler les rangs des trappeurs. Mais la vraie raison du déclin demeure la faiblesse des revenus, compte tenu du coût de maintien d'une ligne de trappe. Mais ce sont ces gens-là, et en particulier les jeunes effectifs qui rebranchent notre société sur la véritable nature, qui en sont les meilleures antennes avec leurs données de récolte, notre seul film historique sur l'abondance relative des espèces animales au Québec, malgré toutes ses tares.

Là où le Clan des loups tire plus juste, c'est lorsqu'il signale que plusieurs fonctionnaires gouvernementaux, agents de conservation et gestionnaires de cheptels seraient bénéficiaires de lignes de trappe dans les réserves fauniques, les meilleures octroyées dans un avenir récent. Doit-on parler de gens qui ont profité de leur position? Ou s'agit-il de gestionnaires de la faune en situation de conflit d'intérêts? Je penche pour la première hypothèse à la condition... de pouvoir prouver qu'il y a eu bénéfice indu. Le Clan des loups conclut plutôt au conflit d'intérêts, comme si on devait exiger des gestionnaires fauniques qu'ils n'aiment pas la pêche, la chasse ou la trappe. Comme s'il fallait que les gestionnaires du saumon soient, par définition de tâche, allergiques au poisson. Ou comme s'il fallait interdire aux fonctionnaires de l'Agriculture de posséder une ferme...

Québec devrait néanmoins revoir ses méthodes d'inventaire et envisager la possibilité d'interdire la trappe aux loups dans les réserves fauniques, comme c'était le cas avant 1984, si les populations s'avéraient effectivement en déclin. La philosophie de plus en plus commerciale qui caractérise la gestion des réserves et, bientôt, celle de toute la faune peut amener des gestionnaires à fermer les yeux sur le sort d'espèces qui ne sont pas ciblées par les clientèles commerciales. Mais, n'en déplaise au Clan, la fédération des trappeurs mettrait rapidement son poids dans la balance. Et avec un dossier plus convaincant.

©Le Devoir 2000


Réaction du CLAN

Le bipède millénariste et les loups

par: Benoît Ayotte
Coordonnateur du Clan et auteur du «Plaidoyer pour le loup du Québec» 16 octobre 2000

Monsieur Francoeur,

C'est avec stupéfaction que j'ai pris connaissance de votre article «Faut-il crier au loup avec les loups?», paru dans Le Devoir, le 11 octobre 2000.

Au-delà d'une objectivité de façade, l'image globale qui en ressort est tronquée, tendancieuse et superficielle. Vous proposez une vision partiale de la réalité, composée de clichés maintes fois répétés par ceux qui se sont donnés le mandat de banaliser l'exploitation de la faune.

Entre vos non-dit et vos insinuations, celui qui ose remettre en question les faits et gestes de ceux qui prélèvent la faune (piégeurs, chasseurs) souffrent obligatoirement « [...] d'une propension à des jugements de valeurs péremptoires et émotifs [...] est surtout le fait d'urbains déconnectés de la nature [...] où les prémisses morales et émotives tiennent souvent lieu de science.» Donc, selon vous, celui qui se rend coupable d'une telle action renie le fier trappeur millénariste qui sommeille en lui.

Wow! Tout un constat sensitif pour un journaliste qui n'a même pas pris la peine de me contacter afin d'en savoir plus sur le Clan des Loups d'Amérique du Nord ainsi que sur mon dossier «Plaidoyer pour le loup du Québec».

Par ailleurs, si vous aviez surmonté vos opinions préconçues et votre analyse primaire, vous auriez appris à mon sujet que j'ai toujours vécu très près de la nature, que je passe le plus clair de mon temps dans des régions sauvages à vivre en harmonie avec les loups, les ours, les orignaux, les caribous et les autres quadrupèdes. Ah oui! Monsieur Francoeur, afin de vous rassurer sur mon compte, je connais très bien le milieu des «régulateurs d'espèces», j'y ai grandi et j'y vis toujours. Cet environnement mérite d'être observé sans complaisance car rien n'est plus agaçant que cette prétention trop souvent répandue par «les préleveurs de la faune» à savoir qu'ils sont les seuls écologistes! Faut-il se rappeler que l'exemple vient généralement d'en haut?

Enfin, éviter toute remise en question concernant les activités de piégeage en associant, sans subtilité aucune, un tel questionnement à des prémisses émotives vient confirmer que les argumentations empiriques demeurent largement utilisées par les «régulateurs» eux-mêmes. En est-il ainsi pour qu'ils puissent échapper à un réel débat de fond sur les vrais enjeux en cause? Serait-ce une nouvelle tendance, un nouveau réflexe contemporain ou simplement un concept formulé par les «préleveurs» de la faune? Allons donc savoir.

Pour bien des gens, les légitimes interrogations soulevées par le «Plaidoyer» méritent une réflexion et des réponses. D'ailleurs, une évaluation plus objective de votre part aurait permis à vos lecteurs et à vos lectrices d'apprendre les faits suivants :

  • selon les autorités responsables, le piégeage est la principale cause de mortalité du loup;
  • le piégeage de 19 espèces animales, incluant le loup, est autorisé sur 1 491 701 km2, soit plus de 98 % du territoire québécois;
  • depuis 1980, le nombre de piégeurs a chuté de 62 %, ils ne représentent que 0,11 % de la population;
  • 8 056 piégeurs ont éliminé, de novembre 1998 à février 1999, plus de 236 932 animaux sauvages, sans compter les captures mortelles d'espèces protégées;
  • grâce à la Loi d'accès à l'information, le CLAN a appris que des biologistes, des techniciens de la faune et des agents de la conservation à l'emploi de la Société de la faune et des parcs du Québec, détiennent «à vie» des territoires de piégeage à droit exclusif, dans les réserves fauniques et que ces activités leur procurent annuellement des revenus substantiels et autres privilèges. Donc, rien à voir avec un fonctionnaire qui décide d'acheter une ferme, de pratiquer la chasse ou de taquiner le saumon;
  • le gouvernement hypothèque l'avenir du loup en autorisant son exploitation tout en ignorant la condition des populations. En effet, l'estimation lupine proposée par l'État reste floue et peu convaincante car elle repose davantage sur des postulats et des extrapolations que sur une véritable étude scientifique;
  • interdire le piégeage dans les réserves fauniques, comme c'était le cas avant 1984, c'est protéger le loup et les 18 autres espèces animales exploitées sur ces territoires publics qui demeurent toujours «propriétés collectives». C'est également accepter les nouvelles tendances et les valeurs actuelles qu'entretiennent de nombreux québécois envers la faune sauvage du Québec.

Comment ces données, aussi essentielles que révélatrices, ont-elles pu vous échapper, vous qui êtes un professionnel de l'information? D'autant plus que, selon plusieurs, vous êtes un journaliste réputé, renommé et ayant de la rigueur. Très surprenant n'est-ce pas? Bon, d'accord, allons-y pour un oubli bien involontaire de votre part!

Finalement, il n'y a rien de pire qu'un régulateur qui accuse tous ceux qui ne pensent pas comme lui d'être un «pôvre citadin émotif». Selon moi, votre opinion limitée demeure un affront à la cause que vous prétendez servir. Tant pis pour la substance et pour ce qui est des supposés critères journalistiques! Eh bien! Vous pourrez toujours repasser.

Sincèrement, jusqu'à la parution de votre article, j'ignorais réellement qu'un journaliste pouvait être assis aussi aveuglément sur ses propres convictions.

Qu'il vous en déplaise, Monsieur Francoeur, le fait d'assurer la pérennité des espèces pour la seule fin de leur exploitation demeure bel et bien une vision désuète et passéiste.

Note : Malgré plusieurs tentatives, Le Devoir a toujours refusé de publier mon droit de réplique.

 
   
clanloups@hotmail.com